samedi 6 août 2011

mardi 2 août 2011

Le globe noir

Jérôme Boch, petit radio-électricien juif, installé depuis depuis de longues années à Puteaux (France), lut en quatrième page de son quotidien habituel, que l'Amérique. s'interrogeait sur certaines anomalies apparues dans la comptabilité du stock de matériaux radioactifs militaires détenus par les U.S.A.
Il n'y avait que deux hypothèses possibles : ou il s'agissait d'un impardonnable bug informatique, ou bien une certaine masse de ce stock avait réellement et mystérieusement disparu.
Cette dernière hypothèse semblait prendre corps dans l'esprit du grand public, confortée par l'attitude embarrassée des autorités, les explications fumeuses des porte-parole accrédités et de la presse et la nature même des matériaux concernés. Il est vrai aussi que cette hypothèse était beaucoup plus excitante !

Jérôme Boch était petit, falot, timide, gris, terne, mais bon technicien et assez débrouillard - ce qui n'est nullement contradictoire - et puis, il avait des idées, parce qu'il était un peu poète. Et quand il avait une idée, il s'y accrochait comme un naufragé à sa bouée.

Son meilleur copain de toujours, un peu plus jeune, un peu barbu, un peu anar, un peu bigleux, était un excellent employé d'une agence d'Import-Export. Totalement intégré au "système", dans la mesure où il rêvait de devenir un brasseur d'affaires, ayant conscience de sa propre valeur, mais tellement rôdé aux délicats mécanismes du commerce international, qu'il avait peu de chances d'évoluer dans son Entreprise, étant trop précieux, précisément là où il était.
Il s'appelait Derrik Petrokian, ce qui impliquait de toute évidence une migration orientale, ayant suivi la grande ligne de fracture eurasiatique de l'écorce terrestre. Cela expliquait en outre, son astuce et son sens inné des "affaires".

Le troisième larron était... un larron. Petit loubard de banlieue, mince comme une asperge, vif, débrouillard, prêt à tout, ambitieux, il attendait la réussite financière et la consécration médiatique, sous la forme d'un "grand coup".
Titi rêvait de troquer son sobriquet habituel pour quelque chose de plus valorisant, comme "le Cerveau" (il connaissait ses classiques...) tant il était persuadé d'en avoir l'envergure.
En attendant ce jour faste, l'État Civil et le Commissariat local ne le connaissait que sous le nom de Jean Latriche.
En fait, sa qualité primordiale était son manque de scrupules, ce qui peut être considéré comme un défaut en quantité limité, mais devient un facteur diablement positif à partir d'un certain degré.

Ce trio de bons copains n'avait apparemment aucun facteur de cohésion.
Cependant, une enquête superficielle aurait pu faire découvrir:
1°, qu'ils étaient tous les trois amateurs de pétanque. 2°, qu'ils participaient aux mêmes concours de pêche-au-coup, du côté de Villeneuve-Saint-Georges. 3°, qu'ils habitaient dans la même ruelle provinciale du vieux Puteaux, à quelques pas de la Seine.

Une enquête plus approfondie aurait décelé qu'ils se partageaient - alternativement - les faveurs, essentiellement charnelles, d'une fleuriste gironde, experte, maternelle, discrète et parfaite cuisinière.
Situation qui ne manque pas de créer des liens indéfectibles.
Bref, de vrais copains !

Jérôme Boch, donc, après avoir pris connaissance de cette information, primordiale, sentit son cerveau grésiller jusqu'à l'apparition d'une sorte de lumière. C'était l'Idée.

Idée qui se matérialisa par la présence d’un gros ballon en plastique rigide, d’environ 60 cm de diamètre qu’il avait récupéré avec ses copains dans les détritus laissés par un petit cirque ambulant, dans un proche terrain vague.
C’était une belle boule d’un noir brillant, qui avait dû faire partie d’un décor, ou bien d’une attraction.

Je passe rapidement sur le mûrissement de l'Idée, sa mutation en idée-force, en énergie motrice, sa communication aux deux autres membres du trio, son acceptation totale dans un consensus fraternel, facilité par quelques rasades de pastis et son parachèvement.

L'idée se transforma en plan d'action précis, structuré et parfaitement décomposé en actions séquentielles, au cours de séances de "créativité" qui auraient pu servir de modèle aux marchands de séminaires spécialisés de l'intelligentsia du Business !

Le Ricard fournissant le carburant nécessaire à cette hyper activité intellectuelle.
Pour plus de commodité et afin que les facteurs matériels et terre-à-terre ne viennent perturber le haut niveau de ces discussions, celles-ci eurent lieu de plus en plus fréquemment dans l'intimité douillette de la fleuriste, laquelle percevant confusément la confidentialité du débat et l'incongruité de sa présence, mitonnait des cassoulets et des goulaschs, qui venaient mettre un terme à une séquence définie de cette gestation.

Enfin, le Plan fut tout à fait au point et se célébra par une extraordinaire séance de galipettes collectives et spontanées, qui n'avaient de païennes que la nudité des corps entremêlés, car la profusion des velours, des satins, des dentelles, des poupées de chiffon et des chromos sulpiciens sur les murs, gelait toute assimilation à une quelconque fresque antique et pompéienne.

Après une longue journée de repos compensateur, nécessaire et bien mérité, le trio entreprit l'accomplissement de la première phase du Plan.

Titi fit appel à son réseau et dota les deux compères de "papiers de substitution", incluant les passeports.
Jérôme se lança dans la conception et la fabrication d'une "machine" dont les éléments constitutifs provenaient d’un “casseur” local et dont l'apparence externe évoquait, pour le profane, du matériel sophistiqué. Un expert aurait déterminé que c'était un très bel appareillage électronique, parfaitement fiable entourant le beau globe noir, dont l’utilité ne paraissait pas évidente !
En réalité, ce globe avait été rempli de sable à l’aide d’un entonnoir, par un petit trou !

Le tout était monté dans un châssis en cornières de fer, habillé extérieurement d'un grillage à grosses mailles. Cela avait finalement l'aspect d'une cage rectangulaire, facilement manipulable par les engins de levage.
Une plaque peinte indiquait seulement quelque chose comme "Strumpf-blic K-2. N°..."
Officiellement, l’engin fut défini comme Appareil expérimental pour la détection et l’étude des bancs de Pagellus Gracilis en eau profonde, ce qui avait une connotation écolo rassurante qu’aucun fonctionnaire normalement constitué n’irait vérifier !

Bien sûr, la fabrication de cette machine d'apparence hautement technique, mais de fabrication artisanale, avait nécessité quelques capitaux dont le petit radio-électricien de Puteaux était loin de disposer. Dans ce domaine également, Titi Latriche s'était avéré être un collaborateur efficace, en pratiquant sans grands risques, quelques "casses" régionaux, suffisants pour alimenter la caisse commune, mais restant astucieusement à un niveau modeste, pour ne pas déclencher des réactions en chaîne dangereuses. De la routine !

Pendant tout ce temps, Derrik Petrokian déployait une intense activité commerciale, passant des commandes, établissant des documents, téléphonant à ses correspondants étrangers. Tout ceci, bien entendu, en marge des activités de la société qui l’employait, Ses excellentes relations dans l'Administration des Douanes, lui furent un aide précieuse.

Toute l'intelligence du Plan résidait dans cette donnée fondamentale: l'impossibilité, pour un enquêteur, de remonter jusqu'au fabricant de l’engin.

En revanche, l'existence physique du "Strumpf-blic K-2" était largement matérialisée, dont une grande étiquette “très fragile - matériel scientifique” garantissait l’inviolabilité.

La palette supportant l’engin fut enlevée par l'entremise d'un camion de location et injectées dans le circuit commercial, patiemment préparé par Derrik.

Cette opération, nécessairement discrète, fut facilité par le fait que l’ engin avait été assemblé et conditionné dans un entrepôt dépendant d'une ancienne sucrerie désaffectée de la banlieue sud. Les séances de pêche à la ligne, fournissaient un alibi suffisant..

La phase 2 du Plan était achevée.
En toute légalité et visibilité, une "Strumpf-blic K-2" avait pénétré dans New-York et avait rejoint sa destination finale, dans un box en sous-sol, loué, situé non loin de la gigantesque tour de 500 mètres qui avait été construite à l’emplacement du défunt World Trade Center.

En fait, notre trio repris discrètement l’engin quelques jours plus tard, avec un petit pick-up bâché de location et prenant la route vers le sud, au hasard, ils démontèrent leur chef d’oeuvre dans un lieu discret et balancèrent les pièces dans la mer, du haut d’un promontoire. Enfin ils brûlèrent le ballon de plastique noir.
Et notre trio de copains retourna en France.

Tout était maintenant en place pour le démarrage de la phase 3 du Plan.

Jérôme s'isola. Il aménagea une sorte de petit bureau confortable, dans le fond de son atelier, là où personne ne pénétrait jamais.
Il le baptisa "QG de l'opération", ferma les stores et se mit à écrire au stylo feutre.
Il établit d'abord une liste de destinataires. En fait tous les dirigeants des grandes nations de ce monde. Les leaders de fait ou de droit. Il y ajouta le Secrétaire Général de l'O.N.U. et en copie "pour information", un certain nombre de personnalités importantes, par leur notoriété ou leur influence réelle, sur la scène politique internationale : le Pape, les patrons des grands organismes financiers internationaux et de l’union européenne.
Il compléta sa liste par quelques “people” de niveau international.
Satisfait, il rédigea sa première lettre, car il n’était pas question d’utiliser l’internet ou le téléphone, ou même un ordinateur !
Mieux encore, il se servit d’un papier acheté directement et anonymement dans une petite papeterie de Bruxelles.
Toutes ces missives furent postées dans différents pays d’Afrique du nord par Derrik Petrokian, au cours de sa tournée de prospection.

«Monsieur le Président (ou toute autre formule convenable). Je vous informe que notre Organisation, animée exclusivement par des sentiments humanitaires, a dissimulé au cœur de New-York une bombe miniaturisée, d’une puissance terrifiante, mise au point par des scientifiques de haut niveau, membres de notre Organisation secrète internationale. Cette bombe est reliée à un système permettant de déclencher un processus irréversible d'explosion, lequel fonctionnera à toute tentative de neutralisation. D’autres bombes de même type ont été placées dans les plus grandes métropoles de la planète. La gravité de cette situation ne vous apparaîtra sans doute qu'avec la certitude de l'existence et de la présence effective de cette menace. Vous trouverez, en annexe, Monsieur le Président, copie de toutes les pièces justifiant cette présence à NY.
La simplicité de cette bombe, sa petite dimension, la fiabilité de son système de mise à feu, sa parfaite dissimulation, s'ajoutant à la modestie, la prudence, la rigueur, la foi de notre groupe, sont autant de facteurs qui rendent dérisoire et suicidaire toute enquête, toute intervention pour neutraliser notre action. Notre objectif ? Forcer les Gouvernements légaux ou de fait, cohabitant sur cette malheureuse planète, à prendre immédiatement les mesures nécessaires pour la rendre vivable ! Mais l'expérience présente et l'Histoire démontrent que vous ne pourriez jamais y arriver sans une contrainte formelle. Nous vous communiquerons des directives globales et des directives ponctuelles, d'application nationale ou régionale. Nous procéderons par paliers successifs, sans hâte, ni précipitation - le monde ne s’est pas fait en un seul jour !... Nous n'avons pas d'idéologie. Nous n'appartenons pas à un quelconque système. Nous ne sommes ni de "droite", ni de "gauche", ni d'ailleurs. Notre seule justification : l'efficacité au service d'une seule cause, non pas le bonheur de l'homme - ce qui serait trop ambitieux - mais tout simplement, les conditions de leur bonheur ! Voilà ! Vous avez tout loisir pour méditer, réfléchir, enquêter, paniquer, conférer avec vos équipes de responsables et vos collègues des autres pays, jouer le jeu, honnêtement, ou encore, ne pas nous croire...

Bientôt, vous parviendront les premières directives. Nous vous donnerons un délai raisonnable pour aboutir. Nous savons que ce sera long, tout au moins tant que cette nouvelle dynamique ne sera pas insufflée dans l'esprit des équipes dirigeantes des différentes nations, en lieu et place de leur sordide ambition personnelle et de leur démagogie structurelle. L'essentiel est d'avancer. Nos messages seront signés de cette fleur, que nous avons choisie, simplement parce qu'elle est jolie.»

Jérôme relut sa lettre plusieurs fois, s'étira de satisfaction, ralluma son mégot-maïs desséché, fit quelques pas pour se dégourdir les jambes, se versa un petit verre de son Chiroubles affectionné, se rassit, toussota et entreprit de dessiner une fleur stylisée qui ressemblait à une fleur de lys, dépourvue de sa rigueur classique :

Content de lui, il termina la soirée dans les bras tièdes et câlins de la belle fleuriste, entre lesquels il s'endormit, bercé comme un bébé, rêvant d'un monde idyllique où tous les habitants du monde, couronnés de fleurs, se donneraient la main dans une ronde joyeuse et sans fin...

Dès le lendemain matin, Derrik Petrokian, qui avait quelques lettres, traduisit ce solennel message en latin de cuisine, afin de lui donner un aspect noble et en quelque sorte historique et Titi Latriche s'embarqua pour Amsterdam, dans le cadre d'un "Week-end au pays des tulipes et des moulins", organisé par la section locale de l'association "Culture et Tourisme Prolétariens".
Toutes les copies de la lettre furent effectuées à Amsterdam même, sur un photocopieur self-service de supermarché. Rien ne fut laissé au hasard !

Enfin, la missive contenant les "Directives de base" fut rédigée et envoyée à son tour.


DIRECTIVES DE BASE - PHASE 1
Article 1 - Supprimer immédiatement toute forme de torture, sur l'ensemble de la Planète. Nota : Une Commission d'enquête ayant tous pouvoirs, devra être constituée sous l'égide de l' O.N.U. Cette première directive sera applicable sans aucun délai et tout manquement relevé, dénoncé par la Commission et non puni, provoquera l'explosion de la bombe.

Article 2 - Cesser toute fabrication et tout commerce d'armements dans tous les pays. Il est évident que cette mesure risque de provoquer un accroissement massif du chômage dans certains pays. Qu’à cela ne tienne ! Nous tolérerons pendant un certain temps nécessaire que les pays concernés poursuivent la fabrication des armes de guerre, dans la mesure où des chômeurs seront employés à la destruction de ces armements. Une autre Commission de contrôle sera également instituée par l'O.N.U., et aura autorité pour visiter les usines d'armement et les arsenaux. (Il est grand temps que le Grand Machin de New-York serve à quelque chose...).
Néanmoins, chaque nation pourra conserver une petite armée de parade, dotée exclusivement d'armes blanches, pour la beauté des défilés et l'entraînement sportif d'une jeune élite. Les armes de ces troupes de parade seront obligatoirement en bois, ou en tout autre matière biodégradable. Les explosifs présentement stockés, seront consommés lors de grandes fêtes pyrotechniques, que les Gouvernements organiseront dans toutes les villes du monde, pour la plus grande joie des populations et pour célébrer l'Ere Nouvelle.

Article 3 - Une Commission Scientifique, d’experts de haut niveau, sera constituée afin de déterminer le ratio démographique idéal pour chaque nation. Feront partie de cette Commission des sommités mondiales de diverses discipline - y compris des experts en économie - Délai: 6 mois. Nous réglerons ensuite le déséquilibre démographique actuel et l'anarchie explosive qui règne dans ce domaine.

Article 4 - Une autre Commission Scientifique de haut niveau sera chargée de proposer des solutions au problème des personnes nuisibles ou socialement irrécupérables. Si la torture est absolument inacceptable, la peine de mort est un pis-aller d'une autre époque, indigne de l'espèce humaine et l'emprisonnement définitif une solution trop incertaine et trop coûteuse pour la communauté.
Les travaux de cette Commission porteront sur les moyens de "geler" cliniquement ces personnes, afin de les ranger proprement dans les tiroirs de locaux ad-hoc. Cette solution est sûre, économique et dissuasive. ( Bien que farouchement critiquée - on ne sait pourquoi - par Jean Latriche ! ).

Article 5 - Chaque nation pourra conserver ses valeurs morales, religieuses et culturelles propres, sa structure sociale et son régime politique .
Mais elles devront cesser toute tentative pour imposer ces mêmes valeurs et structures à d’autres nations ou groupes humains. En contrepartie, l'O.N.U. veillera tout particulièrement à diffuser massivement et universellement, le "bilan" des différents régimes : résultats économiques, création de richesse , partage social, modes de vie, degré de liberté individuelle, etc... afin que les citoyens de la Planète puissent comparer et trouver eux-mêmes le meilleur système politico-économique, en enterrant une bonne fois pour toutes, les "ismes" actuels, inefficaces et dépassés.
L'application de ce premier train de Directives Générales nous parait suffisant, dans une première étape. Dans une deuxième étape, nous réglerons des problèmes plus spécifiques. D’autres directives vous permettront de résoudre tous ces multiples conflits régionaux sans perdre la face, puisque les solutions vous seront imposées! Nous sommes convaincus, qu'une fois lancée, cette dynamique nouvelle vous fera accomplir des miracles, que vous trouverez bien, vous-mêmes, des solutions nouvelles appropriées et que notre intervention se fera de moins en moins fréquente.

Et surtout, n'oubliez jamais... nos petites bombes seront toujours là, pour vous rappeler à vos devoirs. Nous veillerons !

La panique qui s'ensuivit dans les chancelleries et dans les sphères gouvernementales fut indescriptible. Les effets n'en furent pas perceptibles immédiatement, bien sûr, car les menaces de cette sorte se produisent de temps en temps et sont généralement l'œuvre de plaisantins débiles, d’extrémistes fanatiques parfaitement répertoriés ou d'agitateurs professionnels, peu capables de mettre leurs menaces à exécution.
Mais cette fois, il fallait se rendre à l’évidence : l'ampleur du plan, son universalité, la matérialité des circonstances, convainquirent rapidement les Gouvernements de la véracité des preuves fournies, de la réalité de la menace, de l'imminence du danger et de la puissance de cette mystérieuse Organisation occulte, qui tirait les ficelles.

Il fallait bien maintenant définir de toute urgence une politique commune, établir un consensus global sur l'action à entreprendre, les réponses à donner à cet ultimatum, tout en essayant de garder le secret le plus absolu, aussi longtemps que possible, en raison des conséquences incalculables, mais parfaitement prévisibles, que la divulgation de cette situation pouvait provoquer dans les populations directement concernées. .............................................................................................


Jérôme Boch s'exerçait à pointer quelques boules, en échangeant des propos anodins avec Titi.
Ils attendaient Derrik pour commencer leur partie de pétanque, sur leur terrain habituel, en contrebas du boulevard circulaire de la Défense. Derrik avait pour mission de parcourir la presse du jour, pour le cas où quelque information apparaîtrait sur "l'affaire", ou peut-être même, quelques déclarations officielles ou messages destinés à “l’Organisation”.
Entre eux, ils n'en parlaient pas, soucieux, peut-être inconsciemment, de ce qu'ils avaient déclenché et qui les entraînait maintenant comme un torrent sans retour.

De loin, ils virent arriver Derrik Petrokian.
Tout de suite, ils comprirent que quelque chose de grave venait de se passer.
Derrik, hagard, essoufflé, trébuchant, leur jeta un journal et ils se laissèrent tomber sur un banc, anéantis.

Par terre, dans le vent qui l’entraînait le quotidien étalait son titre, énorme, noir, incroyable :


Ben merde alors, merde, merde, merde alors…
répétait Jérôme, inlassablement.
Merde, lui répondit Jean Latriche... C’est pas nous ! On a rien fait ! rien fait du tout !

... et le vent emporta le journal.

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Quelques semaines plus tard...
Des émissaires de la CIA, accompagnés de quelques barbouzes des forces spéciales françaises arrêtèrent sans ménagement notre trio de pieds nickelés, qui fut embarqué à la barbe de la police française et transféré incognito dans un avion militaire américain en direction des USA.
Au centre des décombres de NY, les enquêteurs avaient particulièrement passé au peigne fin le lieu du box loué qui élevait déjà quelques soupçons et en grattant la terre mêlée de cendre, ils ont trouvé un mégot de cigarette.
Le laboratoire consulté a identifié avec quelque difficulté une Gitane-maïs, espèce inconnue aux U.S.A., mais référencée dans le tabagisme Fançais.

On en conclut que cet inoffensive boule noire administrativement identifiée devait être la bombe elle-même, déposée là par des terroristes hexagonaux.
Un patient travail d’enquête, appuyé par la découverte de la présence de notre trio sur le sol américain, peut de temps avant l’évènement, permis l’identification de ces redoutables assassins.

Leur procès est en cour actuellement.
Dans la rue, des milliers de gens crient leur haine et leur soif de vengeance....


Récit écrit dans les années 90, modifié et réécrit en 2011.